« L’amour n’est pas naturel ; et le désir lui-même ne l’est pas longtemps. Mais les sentiments vrais sont des œuvres », Alain

« L’amour n’est pas naturel ; et le désir lui-même ne l’est pas longtemps. Mais les sentiments vrais sont des œuvres », Alain, page 90 de « Propos sur le bonheur », parle de naturel au sens état normal et non pas au sens bio…

Nous en venons enfin au couple, à l’homme et la femme qui non seulement ont à gérer l’autre (autre schéma de pensée, autre éducation, autres priorités, …) mais en plus à gérer un être biologiquement différent, page 91 : « J’aperçois des traits distinctifs qui rendent souvent les deux sexes ennemis l’un de l’autre, sans qu’ils sachent toujours bien pourquoi. L’un est affectif, l’autre actif… Affectif n’est pas la même chose qu’affectueux… c’est une liaison plus étroite des pensées avec les sources de la vie ; cette liaison s’observe chez tous les malades, quel que soit le sexe ; mais elle est normalement plus étroite chez la femme, par la prédominance naturelle des fonctions de grossesse et d’allaitement… D’où les changements d’humeur dont les causes sont naturelles, mais dont les effets donnent souvent l’apparence de la fantaisie, de l’incohérence, de l’obstination. »

Même si la femme de 1908 n’a plus rien à voir avec celle de 2008, sa physiologie n’a pas changé. Les femmes ont conquis durement tous les bastions des hommes durant le XXème siècle et pour ce faire elles ont dû faire des sacrifices. En ce début de siècle les femmes apparaissent comme les grandes gagnantes. Les hommes ont dû s’adapter sous la pression de la nécessité et, le plus souvent malgré tout, par sympathie. Hommes et femmes, nous avons progressé énormément.

Et le clivage homme / femme a-t-il disparu ou au moins diminué ? Non, la physiologie, la nature des hommes et des femmes sont restées les mêmes. Par contre, les relations se sont complexifiées comme à chaque fois que l’on gagne en liberté (cf. divorce), en civilisation. La connaissance réciproque des deux sexes apporte des améliorations de compréhension mutuelle mais pour ce qui est du couple les tensions se sont accrues, car plus personne ne trouve vraiment sa place.

 »L’autre sexe est incompréhensible dans l’inaction. Sa fonction propre c’est de chasser, de construire, d’inventer, d’essayer. Hors de ces chemins il s’ennuie, mais toujours sans s’en apercevoir. De là un mouvement perpétuel pour de petites occasions ; sa bonne volonté, en le dissimulant, l’aggrave. Il lui faut un aliment politique ou industriel. Et il est commun que les femmes prennent aussi pour hypocrisie ce qui est un effet de nature. », page 92, là aussi la vision est bien manichéenne, que l’on pourrait attribuer au début du précédent siècle. On peut quand même louer cette analyse qui aujourd’hui est encore très attendue par le public (« Les hommes viennent de Mars, les femmes viennent de Venus »).

De nos jours, nous n’hésitons plus à analyser la part de masculin et de féminin en nous. Peut-être que l’homosexualité a apporté un démenti puissant de la condition d’homme ou de femme à part entière chez les individus. Du même coup, les hommes et les femmes se sont rapprochés et parfois seule une physiologie qui n’a rien de définitif sépare un homme d’une femme.

Alors est-ce que les modèles présentés par Alain sont-ils encore valables ou bien font-ils partie du terreau de l’humanité, de la Culture ? Vivons-nous selon nos pulsions ou selon nos acquis ? Les pulsions font partie du règne animal, les acquis font partie de la civilisation, les dépasser c’est ça la Philosophie, le progrès humaniste.

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